Par le Conseil local de santé mentale de Lille
Rédigé par Marina LAZZARI, coordonnatrice CLSM de la ville de Lille (coordonnées en bas)
PROBLÉMATIQUE & CONTEXTE
Gestion des situations complexes dans l’habitat concernant des personnes en souffrance psychique
OBJECTIFS
> Lutter contre les inégalités de santé
> Dé-stigmatiser la maladie mentale
> Décloisonner le sanitaire, le social et le médico-social
> Améliorer les conditions de vie dans l’habitat
> Prévenir les expulsions
RACONTEZ VOTRE PROJET…
Le projet représente un des champs d’activité du Conseil Lillois de Santé Mentale (CLSM). Il s’agit du travail intitulé « accès et maintien dans le logement des personnes en situation de souffrance psychique » qui œuvre depuis 2012 sur l’ensemble de la commune. Il comporte plusieurs volets :
– La gestion des cas complexes ;
– La mise en place de dispositifs innovants.
Gestion des cas complexes qui relèvent de l’habitat et de la santé mentale
Une fiche alerte* est envoyée par le.la prescripteur (bailleur public, intervenant·e social·e de Mairie ou Maison de quartier, chargé·e de sécurité et prévention de la délinquance…). Les motifs de signalement sont généralement des troubles du voisinage, odeurs nauséabondes, nuisances sonores ; mais cela peut être aussi une inquiétude d’un·e partenaire. La fiche est réceptionnée de façon anonyme, étudiée collégialement par des professionnel·le.s du sanitaire et du social ; et des pistes d’orientations proposées. En 2019, ce sont 75 situations qui ont ainsi été traitées. Les personnes concernées sont en situation de détresse psychique, pour certaines en rupture de soins et une coordination des partenaires est nécessaire.
Par exemple, Mme F. Gisèle, propriétaire occupante vit dans un extrême dénuement. Âgée de 74 ans, retraitée d’une banque, elle dort à même le sol avec son chien Johnny, accumule des putrescibles, se fait régulièrement accompagnée au distributeur par des personnes malveillantes…La maison est à l’abandon et des risques d’effondrement et d’incendie sont constatés. La situation nécessite une grande coordination entre le CLIC, le service Hygiène, la Mairie de quartier, le centre social, le secteur de psychiatrie, les Petits Frères des Pauvres… Des arrêtés préfectoraux ont été pris afin de mettre Mme à l’abri dans cette maison qu’elle ne veut pas quitter. Un soutien psychologique apporté par l’Espace Écoute Santé lui a été proposé et Mme honore ses rendez-vous avec l’intervenante sociale de la Mairie qui l’amène le jeudi. Après plusieurs mois de coordination, Mme a accepté l’intervention des entreprises de travaux, un débarras a été réalisé en sa présence et avec elle, un nettoyage a été mené, Mme a accepté une mesure de protection. Un service d’aide à domicile intervient tous les vendredis et une orientation vers un SAMPAD est en cours…
*Cet outil est encadré par un guide d’utilisation visant à identifier ce que le groupe entend par « situations complexes habitat santé mentale » et une charte éthique.
Mise en place de dispositifs innovants : l’exemple de Logipsy
Un second volet de ce travail vise à la mise en place de dispositifs innovants lors du constat de dysfonctionnement effectué à partir des cas complexes. En 2016, en réponse à un appel à projet de la DIHAL, l’EPSM Agglomération Lilloise et la Sauvegarde du Nord ont ainsi proposé la création de Logipsy : un trinôme d’interventions pluri-professionnelles favorisant le maintien dans le logement des personnes en situation de souffrance psychique. Ainsi, pour une durée de trois mois renouvelable une fois, sans orientation MDPH, une éducatrice de parcours, un.e TISF et un.e IDE du secteur de psychiatrie vont accompagner la personne dans son logement sur des problèmes d’appropriation, de gestion des conflits de voisinage, d’aménagement de l’intérieur, nettoyage, animaux…Elles établissent progressivement un lien de confiance avec la personne au travers de l’habitat pour travailler l’adhésion aux soins.
On identifie trois types d’orientations vers le dispositif Logipsy :
– une orientation de la psychiatrie pour des personnes suivies ayant effectué un séjour anormalement long en psychiatrie et qui présentent une vulnérabilité importante au retour dans leur logement ;
– des personnes en rupture de soins, connues de la psychiatrie et qui présentent des troubles importants du voisinage qu’il s’agisse de nuisances sonores, olfactives et qu’il convient de ramener aux soins ;
– des personnes qui n’ont pas encore eu d’évaluation ou de contact avec les services de soins en santé mentale.
Voici l’exemple d’un signalement effectué par la psychologue des Espaces Écoute Santé : Mme L. a perdu son conjoint en 2019. Elle était hospitalisée (tentative de suicide). Depuis elle est suivi par un psychiatre du centre médico-psychologique (CMP). Elle fait part de sa souffrance de vivre dans un appartement « vide », « fait pour une famille ». Effectivement son appartement est très grand pour elle toute seule. Mme a des problèmes avec ses voisins.
Ainsi, le CLSM de Lille œuvre à partir d’un travail de coordination des professionnel·le.s à l’amélioration du bien vivre ensemble, la prévention des dégradations des situations et des expulsions.
RÉSULTATS & PERSPECTIVES
Par rapport aux objectifs, quels résultats ont été obtenus ?
> Un meilleur repérage des situations complexes habitat santé mentale (de 53 situations en 2016 à 75 en 2019)
> Un décloisonnement des partenaires de la ville et de la psychiatrie
> L’accès aux soins de personnes en grande détresse mais pour autant dans la non-demande
Avez-vous observé des effets inattendus ?
> À l’occasion de la crise sanitaire et notamment du confinement, les partenaires ont su échanger et les secteurs de psychiatrie se montrer très réactifs face aux signalements.
> En post confinement, les situations ont explosées. En trois semaines, nous avons reçu 22 signalements dernièrement…
Quelles sont les perspectives pour l’action ?
> La poursuite des actions, l’observation fine des situations afin de prendre du recul et identifier des améliorations à apporter.
> Prochainement, nous engageons un travail de mise en réseau des partenaires des quartiers sur la question du syndrome de Diogène.
Si un autre territoire souhaitait reproduire votre action, quels conseils lui donneriez-vous ?
> Rassurer les partenaires sur les questions éthiques
> Favoriser le partenariat avec la psychiatrie pas à pas
> Renforcer les connaissances des partenaires via le centre ressource (dans les Hauts-de-France, le CREHPSY)
FICHE-IDENTITÉ DE L’ACTION
Porteur de l’action : Ville de Lille & Établissement publique de santé mentale Agglomération Lilloise (EPSM AL)
Territoire d’intervention : ville de Lille
Cadre(s) d’intervention/politique(s) politique(s) dans lesquels s’inscrivent l’action : le conseil lillois de santé mentale (CLSM)
Public visé : personnes en situation de souffrance psychique dans leur habitat
Partenaires opérationnels : le CLSM se compose de membres fondateurs comme la ville de Lille, l’EPSM AL, le Groupement hospitalier de l’Institut catholique de Lille, le Centre hospitalier universitaire de Lille, la Coordination mobile d’accueil et d’orientation, la Fédération des Acteurs du social, Lille Métropole Habitat, l’UNAFAM, la FNAPSY, le CISS, le Réseau de soins gérontologiques, l’Union régionale des professionnel·les de santé libéraux médecins généralistes.
Partenaires financiers : le CLSM dispose de trois sources de financements : l’EPSM AL, la Ville de Lille et l’ARS Hauts-de-France. Il répond aussi à des appels à projet afin de monter des actions.
Précisez la gouvernance de l’action : les services de la Ville de Lille (CLIC, Hygiène, Interbailleurs, Direction des solidarités et de la santé, Conseil local de sécurité et de prévention de la délinquance..), l’EPSM, les trois secteur lillois 59g22, 59g23, 59g24, la filière socio-éducative), les personnes concernées ou représentants des personnes concernées et tous les partenaires de l’habitat (bailleurs, service d’aide à domicile, associations, maison de quartier, centres sociaux…)
TERRITOIRE
Votre action s’inscrit-elle dans une dynamique territoriale de santé ?
Un Atelier Santé Ville
Un contrat local de santé
X Un conseil local de santé mentale
Autre
Le territoire est-il couvert par un contrat de ville ?
X Oui
Non
Ne sait pas
Si oui, votre action s’inscrit-elle dans le contrat de ville ?
X Oui
Non
Ne sait pas
AUTRES RESSOURCES
> Fédération de recherche en santé mentale et psychiatrie
CONTACT RÉFÉRENT
Marina LAZZARI
Coordinatrice CLSM
EPSM Agglomération lilloise – Ville de Lille
03 20 49 56 14
Mis à jour en février 2021